L’imagerie médico-légale post-mortem

Melles DECLEIN Julie
             DEMORY Emmanuelle
             DUHAMEL Anne-Sophie
Mme    GUILLEMOT Christine
Mrs      ANDRIAMANANTENASOA Lala
             ORIVAL Matthieu


Promotion 2001-2004
Projet professionnel soutenu oralement le 2 avril 2004
Institut de Formation des Manipulateurs en Electroradiologie de l’AP-HP


I- INTRODUCTION

Le respect de l’être humain vivant ou mort est une exigence quasi constante des civilisations humaines. Ainsi, tout individu doit veiller à ce qu’il ne soit jamais porté atteinte à la dignité des siens dans la vie comme dans la mort et le droit prévoit dans les codes civil et pénal, une peine d’amende et d’emprisonnement, pour tout individu violant cette règle. Cependant, ce concept de respect de la dignité humaine demeure ambigu lorsqu’il s’agit de rendre justice à une personne décédée dans des contextes de mort suspecte ou criminelle, pour lui permettre de « reposer en paix ». En effet dans ce but, la société s’attache à déterminer les causes exactes du décès et à tout mettre en œuvre pour retrouver le coupable du crime, s’il y a lieu.

La pratique d’une autopsie permet alors de répondre à un certain nombre d’interrogations, mais elle porte atteinte à l’intégrité physique du cadavre, ce qui peut amener à considérer comme alternative, un examen radiologique post-mortem qui ne sera pas invasif.

Toutefois, les examens sur cadavre demeurent un sujet tabou, et sont rarement publiquement évoqués de peur d’être accusés de nuire au repos du défunt et de porter atteinte au respect qui lui est dû.

L’imagerie thanatologique, malgré sa faible fréquence, a ainsi la particularité de troubler la majorité des personnels hospitaliers qui y sont confrontés, notamment par manque de préparation psychologique et des techniques des professionnels. Cette méconnaissance se rencontre tout particulièrement chez les manipulateurs d’électroradiologie diplômés, ou chez les étudiants au cours de leur expérience professionnelle, malgré leur rôle prédominant dans la réalisation des techniques radiologiques thanatologiques relevant de leur décret de compétence. En effet, ce dernier n’établissant aucune distinction entre les pratiques radiologiques sur patients vivants ou morts, il appartient donc évidemment aux manipulateurs de réaliser ce type d’examens. Nous étudierons d’ailleurs ce point plus en détails au cours de notre exposé.

Toutefois, nombreux sont ceux qui en découvrent l’existence après un stage ou pendant leur carrière professionnelle. Cette confrontation soudaine et inattendue est souvent déstabilisante surtout psychologiquement. De plus, ce personnel non informé est alors amené à se poser un certain nombre de questions auxquelles il n’obtient pas toujours de réponses claires. Les nombreuses enquêtes entreprises jusqu’alors par les étudiants et professionnels à ce sujet témoignent de cette réalité. C’est lors d’une telle confrontation sur un lieu de stage par trois des étudiantes du groupe, qu’est née notre volonté de faire connaître cette discipline, sans toutefois vouloir se borner à copier les démarches précédemment entreprises.

Par le témoignage de ces trois étudiantes, il ressort globalement qu’un membre du personnel hospitalier, même s’il est quotidiennement confronté à la maladie, ne s’habitue jamais à la mort. Elle lui rappelle que tout individu est vulnérable quel que soit son âge, lui et les membres de sa famille y compris, si jeunes soient-ils, et quels que soient les progrès de la médecine.

Rappelons d’ailleurs à ce sujet, que l’imagerie post-mortem est d’autant plus déstabilisante qu’elle concerne des patients de tout âge, quelque soit leur aspect physique, et concerne même parfois des pièces anatomiques, chose encore plus troublante.

Nous pensons donc que c’est en communiquant mieux, que l’on peut amener l’homme à mieux intégrer la mort comme une étape à part entière de son existence.

A notre échelle, cette communication se manifeste par une volonté d’intégrer quelques heures de sensibilisation à l’imagerie post-mortem, dans la formation initiale et continue des manipulateurs radio. Cela est d’ailleurs déjà rendu possible pour les radiologues par l’intermédiaire du DU d’Imagerie Médico-Légale.

Nous participerons à cette intégration en proposant des plans de formation initiale et continue, qui établiront des liens documentaires, avec entre autres, les différents travaux déjà effectués à ce sujet.

Ces plans de formation pourront, par ailleurs, être mis à disposition des instituts français de formation au DE et DTS.

Enfin, nous établirons des protocoles de réalisation d’examens post-mortem, en tenant compte des divers contextes d’exploration, afin que ceux-ci puissent éventuellement être utilisés pour harmoniser la pratique de ces examens dans les hôpitaux français.


II- PRESENTATION DE LA METHODE

Une fois le thème du projet choisi fin septembre 2003, notre premier objectif fut de réfléchir sur l’identité de notre référent et de notre expert. Devant être capables de nous guider dans la réalisation de notre travail, il fallait à juste titre que ces personnes aient une certaine expérience de l’imagerie post-mortem.

Nous avons ainsi choisi Madame VILMONT, formatrice dans notre institut de formation de l’AP-HP, comme formatrice référente pour ses connaissances éthiques et son expérience de l’imagerie post-mortem au travers de pièces anatomiques.

C’est grâce aux relations de cette dernière que nous avons pu contacter le Docteur HAZEBROUCQ, maître de conférence des universités, praticien hospitalier au CHU Cochin, radiologiste et légiste qualifié, expert auprès de la cour d’appel de Paris et coordonnateur du DU d’Imagerie Médico-Légale de l’Université René Descartes Paris V, afin qu’il soit notre expert.

L’objectif premier de notre projet était d’établir un travail de synthèse sur la médecine légale et l’imagerie post-mortem, pour qu’il puisse être remis aux étudiants manipulateurs radio dans le but de les sensibiliser à cette réalité. Nous même étonnés par la pratique de tels examens, aucunement imaginés jusqu’à y être personnellement confrontés en tant que stagiaires manipulateurs radio, nous avons en premier lieu cherché à savoir si cela figurait dans notre décret de compétence. Si ce dernier n’y fait pas directement allusion, certains de ses articles peuvent toutefois laisser sous-entendre que nous faisons partie des acteurs intervenant dans les pratiques d’imagerie post-mortem. Nous nous sommes alors posés la question suivante : « Pourquoi le sujet n’a-t-il jamais été abordé durant notre formation ? »

Cette question devenait d’autant plus pertinente que nous constations à quel point ces examens pouvaient troubler un certain nombreux d’étudiants et professionnels manipulateurs radio. En effet, nombreux sont les travaux déjà réalisés à ce sujet (par les étudiants de Clermont-Ferrand, Poitiers, Corbeil-Essones, Orléans et par les membres de l’AFPPE dans plusieurs numéros de la revue « Le Manipulateur »). Nous avons alors souhaité savoir si, comme nous, beaucoup d’étudiants et professionnels découvraient cette réalité en terrain hospitalier, ou si au contraire, les autres instituts de formation avaient inscrit ce sujet au programme. Pour cela, nous avons réalisé des questionnaires adressés mi-octobre aux étudiants manipulateurs radio de France, aux directeurs et aux formateurs des instituts de formation. Visiblement troublés par ces pratiques, nous avons constaté que la majorité des étudiants souhaitaient avoir connaissance de notre travail une fois ce dernier achevé. Mais pourquoi alors, les travaux déjà effectués à ce sujet, n’ont-ils pas servis à les sensibiliser à ces techniques ?

Pourquoi sont-ils restés dans l’ombre malgré leur pertinence et leur validation par l’AFPPE notamment et d’autres expert comme le Docteur HAZEBROUCQ par exemple ? Sans doute parce que ces pratiques sont jugées par les formateurs, directeurs d’instituts de formation et cadres des services de radiologie comme trop exceptionnelles pour mériter la mise en place d’une formation initiale et continue destinée aux manipulateurs radio. Pourtant on s’accorde tous à dire qu’une pratique est d’autant plus déstabilisante qu’elle est exceptionnelle, surtout quand celle-ci concerne un sujet aussi tabou que la mort. Citons pour exemple les nombreuses formations aux premiers secours dispensées au personnel hospitalier en formation initiale et continue. Si elles sont si fréquentes, c’est parce que la réanimation, pour le personnel non spécialisé dans ce domaine, n’est pas une pratique journalière mais exceptionnelle et déstabilisante puisqu’elle nous confronte à la fragilité des fonctions vitales. Pourquoi n’en est-il donc pas de même pour l’imagerie post-mortem ?

Nous avons ainsi voulu savoir si le personnel confronté à ce type d’examens aurait souhaité une formation ou assistance psychologique. Dans le cas contraire, nous comprendrions mieux le manque de formations aux techniques radiologiques post-mortem. Ainsi courant novembre, nous avons réalisé des questionnaires distribués aux services de radiologie des hôpitaux de l’AP-HP et de certains établissements de province.

Parmi le peu de réponses reçues, il apparaît tout de même qu’une formation serait appréciée. Notre objectif final a alors été modifié, sur les conseils de nos coordinateurs de projet.

Pourquoi refaire un travail similaire à ceux déjà établis par les étudiants précédents, pour qu’il finisse de nouveau dans l’ombre ?

Nous avons ainsi décidé de collecter le maximum de documents et travaux de synthèse réalisés jusqu’à présent, le but pédagogique de notre travail devenant alors d’établir des plans de formation initiale et continue aux pratiques radiologiques post-mortem. Ces derniers, en établissant des liens avec les documents auparavant collectés, permettront aux différents auteurs de mieux « exploiter » les travaux sur lesquels ils ont travaillé pendant plusieurs mois.

Par ailleurs, ils pourront servir de base à l’intégralité d’une formation dans les différents instituts de préparation au DTS et DE de manipulateur radio.

Enfin, les différents protocoles radiologiques que nous avons établis serviront peut-être à homogénéiser les pratiques radiologiques post-mortem d’Île de France.

Nous remercions d’ailleurs, pour les documents qu’ils nous ont aimablement faits parvenir, Christian BERJON et Catherine THIBAUT de l’AFPPE, les étudiants manipulateurs radio de Clermont-Ferrand, Poitiers, Dijon, Orléans, Corbeil-Essonnes et l’Institut Médico-Légal d’Evry, sans oublier nos coordonnateurs de projet, le Docteur Vincent HAZEBROUCQ et Madame Laurence VILMONT.


III- PLANS DE FORMATIONS INTIALE ET CONTINUE

Pour prendre contact avec les auteurs de ce travail et obtenir tous les renseignements complémentaires, cliquer ici


IV- CONCLUSION

L’hôpital est un lieu de vie, de convalescence et de mort, dans lequel tous les professionnels de santé s’accordent à dire que leur métier consiste surtout à mettre toutes leurs connaissances au profit des patients pour les soigner et les maintenir en vie. La mort semble ainsi être considérée comme une étape de l’existence pour laquelle le personnel médical se considère quelques fois comme impuissant. Ce sentiment d’impuissance fait parfois naître une certaine culpabilité envers le défunt et sa famille, et crée un manque de communication interprofessionnelle et avec les proches du défunt. A plus grande échelle ce sentiment d’impuissance est à l’origine d’une lacune des programmes de formation des manipulateurs radio. En effet, rares sont les instituts de formation qui prévoient quelques heures de sensibilisation à la prise en charge du décès à l’hôpital et aux techniques d’imagerie post-mortem.

Ceci est d’autant plus regrettable que le droit au respect et à la dignité des individus est une des valeurs essentielles de notre société actuelle. En effet, en rendant accessibles les nouvelles techniques d’imagerie à la médecine légale, on épargne aux familles d’avoir à surmonter l’épreuve de l’autopsie en plus de celle du deuil. C’est pourquoi l’imagerie post-mortem semble en pleine expansion. Si les manipulateurs radio d’Île de France n’ont pas réellement conscience de ce développement dans les pratiques hospitalières, c’est en raison de l’existence d’instituts médico-légaux spécialisés. Les pratiques radiologiques post-mortem dans ces hôpitaux concernent ainsi principalement des produits d’avortement.

Toutefois, en province, ces pratiques concernent également les victimes d’un crime, d’une mort suspecte, d’un suicide.

La radiologie post-mortem, en obéissant à un guide de bonnes pratiques dispensé dans notre formation initiale et continue comme c’est déjà le cas pour les radiologues au travers d’un diplôme universitaire, permettrait à la justice et à la police d’obtenir de meilleures réponses sur les circonstances et causes d’un décès. Cette démarche ne va pas sans la création d’une unité de thanatologie qui trouverait naturellement sa place dans chaque structure hospitalière, et permettrait ainsi la réalisation immédiate de ces examens. Cette considération est d’autant plus d’actualité que Monsieur Olivier JARDE, député de la Somme, vient de remettre son rapport à Monsieur Jean-François MATTEI, Ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, concernant l’organisation de la médecine légale. Ce rapport insiste tout particulièrement sur la nécessité « de garantir à toute victime un égal accès aux techniques médicales de pointe », que cette dernière soit vivante ou morte, sans oublier de « leur offrir un accueil et une écoute de qualité ainsi qu’à leurs proches ».

La radiologie post-mortem doit, au travers de la médecine légale, d’après ce même rapport, permettre « le développement de la formation et de la recherche ».

Et si ce rapport a pour but explicite « d’organiser une médecine légale qui ne cesse depuis trente ans d’élargir son champ d’intervention sous la poussée du progrès et des exigences sociales », le nôtre a pour but d’en organiser les pratiques radiologiques post-mortem.

Il nous serait alors possible d’imaginer la perspective d’une mort moins taboue dans nos établissements de santé, et en extrapolant, dans notre société, si nous en améliorons la prise en charge, sans négliger celle des familles.



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